Débuté jeudi à Lomé (voir ici : https://letabloid.tg/dettes-illegitimes-et-impacts-la-societe-civile-togolaise-a-la-quete-dalternatives/ ), le séminaire de renforcement des capacités des femmes et des organisations de la société civile togolaise sur les dettes illégitimes, leurs impacts sur les droits humains et les alternatives possibles a refermé ses portes ce samedi. Au terme de la rencontre, les participants ont formulé des recommandations et pris des résolutions contenues dans une déclaration présentée par le président de l’Association pour la taxation des transactions financières et l’action citoyenne au Togo (ATTAC Togo) Liebe Fawiya, au cours d’une conférence de presse de clôture.
Les participants se sont ainsi engagés à intensifier les actions/campagnes d’information, de sensibilisation et d’éducation populaire sur la dette afin de susciter la construction de mouvements sociaux forts capables d’inverser le rapport de force en faveur des couches populaires, entre autres. Ils plaident pour un rejet des dettes illégitimes, un audit citoyen de la dette publique du Togo, la remise en cause des accords de partenariat économiques (APE), la sortie des Etats africains du franc CFA et la création de monnaies nationales…
Lire les détails dans la Déclaration de Lomé ci-dessous.
SEMINAIRE DE RENFORCEMENT DES CAPACITES DES FEMMES ET DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE TOGOLAISE SUR LES DETTES ILLEGITIMES, LEURS IMPACTS SUR LES DROITS HUMAINS ET LES ALTERNATIVES POSSIBLES
DECLARATION DE LOME
La lutte contre les dettes illégitimes, illégales, insoutenables et odieuses est au cœur des préoccupations de la société civile africaine, et même occidentale, depuis plus de deux décennies. C’est dans cette optique que le Comité pour l’abolition des dettes illégitimes (CADTM), en partenariat avec ATTAC Togo, a organisé un « atelier de renforcement des capacités de la société civile sur les dettes illégitimes, leurs impacts sur les droits humains et les alternatives possibles » du 07 au 09 septembre 2023 à Lomé. Cet atelier a regroupé des participants issus de sept pays africains : le Maroc, le Mali, le Togo, la République démocratique du Congo, le Benin, le Burkina Faso et le Cameroun.
Les ateliers ont abordé les axes suivants :
✓ La dette, un instrument du sous-développement de l’Afrique ;
✓ Les accords de libre-échange et la dette en Afrique : deux instruments au service de l’impérialisme;
✓ Les impacts des projets financés par la Banque Africaine de Développement (BAD) sur les populations
✓ Microcrédit et endettement en Afrique ;
✓ Les alternatives pour sortir du piège de l’endettement.
Animés par des militant·e·s et des acteur·rices de la société civile, ces modules ont généré des échanges et débats en plénière qui ont conduit à l’adoption des résolutions et recommandations suivantes :
A – Résolutions
Les acteur·rices de la société civile présent·e·s au séminaire :
1- Réaffirment leur engagement à se mobiliser davantage, à s’organiser et à fédérer leurs efforts dans la lutte contre les dettes illégitimes, illégales, insoutenables et odieuses en Afrique ;
2- S’engagent à intensifier les actions/campagnes d’information, de sensibilisation et d’éducation populaire sur la dette, afin de susciter la construction de mouvements sociaux forts capables d’inverser le rapport de force en faveur des couches populaires ;
3- Encouragent les organisations de la société civile africaines à mener des audits citoyens de la dette dans leurs pays respectifs, avec la participation effective des citoyen·nes dans le processus ;
4- Exhortent la société civile africaine à mettre en place des dynamiques sociales nationales, régionales, continentales et même internationales pour élargir le front contre les dettes illégales, illégitimes, insoutenables et odieuses en Afrique ;
5- Réaffirment la volonté populaire d’indépendance et de souveraineté réelles des pays du Sud.
B- Recommandations
La société civile africaine :
1- Exhorte tous les dirigeants africains à répudier les dettes illégitimes, illégales, insoutenables et odieuses et à refuser la poursuite des conditionnalités antisociales et néolibérales imposées par les Institutions de Bretton Woods (FMI et BM) et par la Banque Africaine de Développement (BAD) ;
2- Exige la sortie des Etats africains du franc CFA et la création de monnaies nationales avec des banques centrales nationales qui vont fixer les parités de leurs monnaies en fonction de leurs spécificités économiques ;
3- Exhorte les dirigeants africains à mettre en place une Banque du Sud comme alternative aux Institutions financières internationales (IFI) ;
4- Exhorte les gouvernements des pays du Sud à prendre des mesures unilatérales et souveraines de désendettement, seule voie pour l’autodétermination des peuples ;
5- Plaide pour un audit citoyen de la dette publique au Togo qui intégrera toutes les composantes de la société civile et les couches populaires du pays. Exige le droit à l’information et à un accès libre à tous les documents relatifs à cette dette.
6- Exhorte les Etats africains à développer des mesures alternatives à la dette pour financer leurs projets et programmes de développement, notamment en adoptant une fiscalité juste qui augmente les ressources de l’Etat et réduit ses besoins de financement par la dette extérieure, et en promouvant un modèle de développement endogène, autocentré avec pour priorité la garantie des droits économiques, sociaux, culturels et politiques des peuples ;
7- Lance un appel aux dirigeants(tes) africains(caines) à plus de transparence et de redevabilité dans la gestion des dettes publiques, vis-à-vis de leurs populations ;
8- Exige la mise en place d’un système de contrôle pour stopper les flux financiers illicites et aider l’Afrique à rapatrier ces fonds et à poursuivre les auteurs ;
9- Demande la remise en cause des accords dits de « partenariat économique » et de la zone de libre-échange continentale africaine qui sont des accords coloniaux et constituent un mécanisme de pillage extractiviste et de domination de nos pays par les multinationales ;
10- Exige la mise en place de projets alternatifs de coopération commerciale construite sur les principes de solidarité, de complémentarité, de justice et place l’être humain au centre de ces principes ;
11-Refuse le système du microcrédit qui accentue la pauvreté et dénonce les harcèlements des institutions de la microfinance plus particulièrement contre les femmes ;
12- Exige la création d’un système de crédit public sans intérêt ou avec un intérêt plus bas destiné aux pauvres, tout en poursuivant la création des emplois en augmentant les budgets d’investissement dans les secteurs publics, l’arrêt du démantèlement des services publics (éducation, santé) et la renationalisation des entreprises publiques et les terres agricoles privatisées ;
13- Encourage l’internationalisation de la loi belge sur les fonds vautours afin de contrecarrer leurs actions ;
14- Exige des pays européens, de reconnaître et payer leurs dettes climatiques aux pays africains sans les conditionner à des prêts, en guise de réparations liées aux émissions de carbone et de gaz à effet de serre.
Fait à Lomé, le 09 septembre 2023
La Coordination CADTM Afrique