On l’annonçait vendredi dernier (https://letabloid.tg/actualite/education/enseignement-superieur-une-convention-signee-entre-les-universites-publiques-et-les-etablissements-prives-les-grandes-lignes-du-partenariat/), une convention a été signée entre les universités publiques du Togo et le Conseil des établissements privés d’enseignement supérieur (CEPES) et scelle un partenariat visant à relever la qualité de l’enseignement supérieur dans le privé. A la grande joie des représentants des deux entités à savoir, le 1er Vice-président de l’Université de Lomé (UL) Prof Komlan Batawila, le Président de l’Université de Kara (UK) Prof Komla Sanda et le Président du CEPES Martial Akakpo, au cours de la cérémonie de signature dans la salle de conseil de la Présidence de l’Université de Lomé, salle Prof Koffi Ahadzi-Nonou. Mais cela n’a pas été un long fleuve tranquille.
« C’est un accouchement difficile. En médecine, on parlerait d’accouchement dystocique, parce que le mariage a été difficile. Cela fait des années que l’idée couve dans la tête des uns et des autres, mais sa mise en œuvre n’a pas été simple. L’ambiance qui anime cette salle au cours des cérémonies de ce genre est souvent plus gaie, le froid que je remarque en dit long. Ce qui veut dire que l’approche des deux entités n’a pas été facile. Lorsque les deux entités se sont essayées à l’exercice, il n’est pas tout à fait sincère », a indiqué le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Prof Majesté Ihou Wateba, non sans appeler ses collègues à un dépassement de soi et faire de ce partenariat une réussite.
« Je voudrais que chacun se mette à la place du chef de l’Etat qui, lorsqu’il montait son gouvernement pour ce nouveau quinquennat, en octobre (2020), avait placé au cœur des priorités la qualité de l’enseignement comme un des objectifs à atteindre. Et en dehors du projet 10 qui est axé sur la qualité de l’enseignement, il y a aussi le projet 11 à savoir, l’amélioration des politiques enseignantes axées sur les métiers prioritaires», a relevé l’officiel du gouvernement, la cheville ouvrière de ce partenariat entre les universités publiques et les établissements privé d’enseignement supérieur, les conviant à se rappeler que « Le Togo est un et unique et que d’un côté, nos ambitions et nos objectifs se rejoignent».
Le foisonnement des écoles privées répond à une réalité indéniable, celle de l’incapacité des universités publiques à satisfaire tous les besoins en matière de formation. «Une des réalités, c’est que les établissements d’enseignement supérieur publics, qu’ils le veuillent ou pas, ne sont plus capables d’accueillir la totalité de ceux qui viennent frapper aux portes des universités. Quand on rentre dans une école primaire gratuite, nous devons nous attendre à la massification des étudiants, des demandeurs de formation (…) Dans quelques jours, nous aurons à peu près encore cinquante mille (50 000) étudiants qui vont intégrer les universités, qu’elles soient publiques ou privées. A l’heure où nous parlons, avec le distanciel et les mesures des nouvelles technologies de l’information et de la communication, nous n’arrivons pas à cerner et servir tous les étudiants (…) C’est pour cela que nous devons composer avec ceux qui s’essaient aussi », a noté Prof Majesté Ihou Wateba, ajoutant que « l’enseignement privé, quelle que soit la qualité de ce qu’elle met sur le marché de l’emploi, est une réalité ». Dès lors, «il n’est pas question de créer des politiques pour éliminer qui que ce soit de la sphère ou sur le terrain. Il est plutôt question de voir les voies et moyens qui peuvent amener les deux entités à se compléter, fédérer leurs énergies, leurs savoir-faire pour que le Togo soit gagnant ».
A en croire le ministre, il est effectué un diagnostic des établissements privés d’enseignement supérieur avec pour objectif, non pas « d’identifier des poches de faiblesses pour éliminer les uns et les autres » – des faiblesses existent, elles sont d’ordre structurel et humain et il compte les régler étape par étape -, mais pour « mieux se connaitre pour savoir où il faut aider pour que les uns et les autres deviennent plus performants ». Et d’en attribuer tout le mérite au chef de l’Etat, « qui veut pour tous ses enfants, que tout le monde émerge ». « C’est un père de famille qui répare, s’intéresse aux problèmes de tous. Et c’est cette vision qu’il a essayé de nous confier, nous, à l’Enseignement supérieur, de faire en sorte que cette famille bipolaire où le père de famille que j’incarne, d’une certaine façon, est à la tête de deux jumeaux qui n’ont qu’une chose à faire : s’aimer, s’entendre et s’entraider », dit-il.
Comme solution, la première, a évoqué Prof Majesté Ihou Wateba, « c’est améliorer la qualité des enseignants qui interviennent dans ce secteur. Cela s’appelle le compagnonnage », trouvant en les universités publiques les entités plus indiquées à « accompagner les structures faibles », dotées qu’elles sont de « l’art de l’enseignement, de la pédagogie et de ce pouvoir moral pour pouvoir accompagner les gens vers l’excellence ». « C’est pourquoi il nous revient encore aujourd’hui, nous enseignants du supérieur, de savoir tendre la main aux gens les plus faibles pour les amener vers l’excellence. Parce que, que nous le veuillons ou pas, il n’y a personne dans cette salle qui n’ait un fils, un petit frère, un neveu, un cousin, quelque part dans une école privée. C’est pour cela que nous avons le devoir de nous entraider », a-t-il déclaré.
Quels sont les types d’enseignants qui vont bénéficier de ce partenariat ? « Ce sont d’abord des gens nantis qui ont le doctorat », précise l’officiel du gouvernement, et de doucher l’orgueil (sic) sur fond de jalousie des enseignants des universités publiques : «Nous tous, nous avons été recrutés avec un niveau de base le doctorat. Et c’est avec ce doctorat obtenu dans les universités publiques, nous l’avons précisé. Ce sont ces gens qui vont postuler. Ça veut dire que désormais, ces gens vont reconnaître leurs maitres que vous êtes dans les universités publiques pour les aider à évoluer. Et je peux vous dire que la surprise ne viendra pas forcément du public, parce que le public, il est ce que nous savons ; la surprise peut venir aussi du privé ».
Au-delà de ce lien de subordination, les établissements privés ont aussi des qualités que le ministre appelle les universités publiques à copier : « Ce que nous ne savons pas faire et que les privés, eux, savent faire et que nous allons apprendre d’eux, c’est leur capacité à lever des fonds, à être concurrentiels, à se battre lorsqu’il n’y a pas un appui extérieur. Si vous voulez réussir dans la vie, gérez votre entreprise comme on gère une structure privée. Dans le privé, on se demande : qu’est-ce que je fais quand les temps sont durs pour toujours subsister ? Mais dans le public, on se demande : quels sont les avantages liés à ma fonction ? ». Le membre du gouvernement descelle deux visions complémentaires qui, fédérées, feraient de « ce monde (de l’enseignement supérieur) assez difficile, quelque chose de pratique, où nous pouvons relever les défis auxquels nous sommes confrontés ». « Le Togo est un et nous devons tous travailler pour nous entraider », croit dur comme fer Prof Majesté Ihou Wateba, et de requérir une volonté d’entraide de la part deux entités, tout en reconnaissant que « ce n’est pas une mission facile » et relevant l’obligation de le faire.
Il reconnaît toute la complexité de sa tâche et en fait l’aveu à ses collègues : « Je me retrouve aujourd’hui à la tête d’un département où je dois prendre des décisions difficiles. Difficiles parce que je ne me considère plus médecin, ni enseignant. Je me considère tout simplement comme un père de famille qui est à la tête d’une famille, d’un département bipolaire. Je dois faire avec », les appelant à supporter qu’il mette de temps en temps à l’eau des efforts que les uns et les autres ont pu faire par le passé, voulant que l’appropriation des gains se fasse de façon inclusive.
« Des orages nous attendent, mais avons l’impérieux devoir de conduire le bateau à bon port. Ce ne sera pas une mince affaire, mais notre volonté commune de transcender les difficultés, d’aller au-delà de ce sui semble inimaginable est plus forte et je pense que si nous mettons en œuvre toute cette volonté, il n’y a rien qui puisse nous dépasser, nous irons tous de l’avant. Que chacun d’entre vous se mette à la place du ministre de l’Enseignement supérieur et qu’il se dise qu’il aura à rendre compte autant des privés que des publics. Que chacun d’entre vous se mette à la place de Madame le Premier ministre. Que chacun d’entre vous s’imagine le chef de l’Etat, c’est là que vous comprendrez que les problèmes du Togo, il n’y en a pas plus important que d’autres, ce sont des problèmes qu’il faut régler ensemble. C’est ensemble que je vous convie à ce partenariat pour qu’une fois encore, ce qui semble impossible devienne possible », a déclaré le membre du gouvernement, et d’en appeler prioritairement à la responsabilité des présidents d’universités : « Vous aurez une lourde mission de porter dans les faits ce partenariat que nous accouchons de façon dystocique, mais nous avons ce devoir de réussir parce que l’échec n’est pas admis (…) dans ce monde où tout le monde va vite ».
A en croire le Prof Majesté Ihou Wateba, devrait débuter bientôt la rédaction des curricula pour harmonier les enseignements de Lomé à Cinkassé et dans toutes les écoles, ce qui permettra « d’enseigner la même chose et partout en suivant les référentiels de qualité ». « On peut toujours critiquer, on peut toujours trouver ce qui n’est pas bien ; mais on ne nous demande pas ici de décrire les vents sur l’océan, de dire les difficultés qu’il y a sur la mer. On nous demande, sachant qu’il y a des difficultés, de mettre tout en œuvre pour que nous puissions naviguer et arriver à bon port », a-t-il exhorté, au demeurant.